YAMATO, abandonné en punition : un cas à part ?

Cela fait un certain temps que les médias nous relatent de manière épisodique des histoires choquantes et marquantes d’enfants battus, maltraités par leurs propres parents au Japon. Un nouveau fait de ce genre a fait la une de la presse japonaise. Est-ce un cas isolé ?

Yamato est un petit garçon âgé d’à peine 7 ans. Il a fait la une des journaux du Japon mais aussi dans le monde entier pour un fait traumatisant infligé de la part de ses parents.  Pourquoi ? Car le 28 mai dernier, Yamato était en voiture avec ses parents lorsque ses derniers, agacé par sa désobéissance,  il continuait à jeter  des cailloux sur des voitures en dépit des avertissements de ses parents, ont décidé de l’abandonner sur la route, près de la forêt d’Hokkaido ! Par chance, le petit garçon a été retrouvé sain et sauf, six jours après avoir été abandonné, sans trop de séquelles. Il a pu survivre dans la forêt, se trouvant à proximité d’une sorte de refuge où il a pu s’abreuver à un robinet. En revanche il était affamé et c’est un membre des Forces d’Auto-Défense qui l’a retrouvé. En fils aimant le petit Yamato a pardonné à ses parents, après que son père se soit publiquement excusé tant auprès de son fils que du reste de la société. En effet, le père, après l’avoir abandonné, retourna en arrière quelques minutes plus tard pour récupérer son fils mais trop tard Yamato avait disparu.  Est-ce de la maltraitance ? Certainement et on peut supposer que les parents s’en rendent compte étant donné qu’ils ont menti en premier lieu avant de dire la vérité à la police lorsqu’ils ont lancé un avis de recherche. Cependant, le père ne sera pas poursuivi en justice pour avoir abandonné, ne serait-ce que quelques minutes, son enfant (soulignons ici que l’histoire aurait pu se terminer bien plus mal pour Yamato). Le reflet de l’éducation à la japonaise ? Non, sûrement pas, et pour cela une explication, c’est que selon les autorités japonaises, ces cas de maltraitance sont juste signalés plus facilement et ainsi relayés par les médias. Si l’éducation à la japonaise est considérée en Occident comme étant très rigide et peu affectueuse, si les parents et le système éducatif du Japon tendent à faire de l’enfant un citoyen modèle pour la société, la maltraitance des enfants n’est pas plus présente au Japon qu’ailleurs,  mais des cas de maltraitance excessive existent comme en atteste l’histoire du petit Yamato. Au contraire,  l’enfance des japonais est toute autre puisque selon le sociologue et psychologue Hiroaki ENOTOMO pour Le Point, les parents ont « depuis l’époque Edo tendance à être trop complaisants vis-à-vis des enfants », et donc l’histoire de Yamato n’est pas le reflet d’une éducation.

Mais elle est le reflet d’un réel problème qui touche la société japonaise, Yamato n’est malheureusement qu’un enfant parmi tant d’autres à qui un drame est arrivé. Souvenez-vous, il y a un an, une jeune adolescente de 17 ans avait été hospitalisée car en ne s’occupant pas assez bien de ses poissons, la jeune fille avait provoqué la colère de ses parents, raison pour laquelle ces derniers l’ont « discipliné » en versant du détergeant dans l’aquarium et en obligeant la petite à manger cru un par un les 30 poissons qui y vivaient (pauvres poissons !).  Extrême, d’autant que les parents n’en avaient pas été à leur coup d’essai, et avaient même été arrêté à 4 reprises l’année précédente pour maltraitance sur leur enfant : les parents avaient  notamment brûlé la langue de leur fille avec une cigarette. Quelques mois auparavant c’est une fillette qui est morte ébouillantée par sa propre mère et un petit garçon mort battu par son beau-père qui défraient la chronique. En 2014, un adolescent de 14 ans s’est suicidé par pendaison, et pourtant il avait dénoncé le comportement de ses parents et avait demandé de l’aide, mais rien n’avait été fait. Des faits divers qui choquent en majorité les japonais, preuve s’il en fallait une que la discipline rigoureuse à l’extrême n’est pas inscrite dans le gêne des japonais. Mais ces faits peuvent s’expliquer par le changement intervenu dans la notion de famille : si avant, un certain nombre de générations vivaient sous le même toit, c’est de moins en moins le cas de nos jours. Couplé avec une crise tant sociétale qu’économique, certains parents seraient ainsi en détresse, et encore nous n’abordons pas ici spécifiquement la crise des parents célibataires. Ainsi le Ministère de la Santé du Japon rapporte qu’en mars 2015, 89 000 cas de mauvais traitement contre des enfants ont été signalés au cours de l’année précédente. Fin 2015, en 6 mois 17 224  cas ont été recensés par les autorités nippones.  En France, à titre de comparaison, en 2015, 98 000 cas de maltraitance infantile ou de risque de maltraitance ont été signalés.

Si ces chiffres semblent en baisse au Japon, l’heure n’est pas aux réjouissances car le souci c’est de signaler ces mauvais traitements, chose plus difficile à faire. Et sans signaler la maltraitance infantile, comment la combattre ? Le quotidien The Japan Times estimait en 2015 que nombreux sont les cas d’enfants psychologiquement ou physiquement maltraités et qui n’étaient pas déclarés. Et pourtant une loi protège les enfants existe bien au Japon, inscrite dans la Constitution de 1947 ! Cette loi oblige la société japonaise à détecter et à dénoncer ces maltraitances infantiles. En avril, un collectif de pédiatres japonais dénonçait déjà une erreur de chiffres de la part du gouvernement, estimant que le nombre d’enfants morts en raison de la maltraitance devait être revu à la hausse. D’autres médecins remarquent eux un manque d’investigations et un problème de coordination de la part des  organismes dédiés à la protection de l’enfance. L’histoire de Yamato a en tout cas relancé le débat sur la notion de discipline et ses excès.

Source : The Japan Times, Asahi Shimbun, Le Point, Paris Match, Madame Figaro, L’enfant bleu Toulouse.

Photo : forêt d’Hokkaido, The Japan Times ©KYODO

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