Des armures de « DAIMYO, Seigneurs de la guerre au Japon » fascinantes et inédites

Pour la première fois, le musée national des Arts asiatiques-Guimet et le Palais de Tokyo s’associent pour l’exposition « DAIMYO, Seigneurs de la guerre du Japon ». Avant Japonismes 2018, toute une époque féodale se révèle à travers des ensembles d’armures exceptionnelles et pour grand nombre inédites !

« DAIMYO, Seigneurs de la guerre au Japon » en trois sites

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Une des armures de daimyô présentée dans la rotonde du musée Guimet ©2018 Japan FM.

C’est un évènement rare pour être particulièrement souligné que de pouvoir observer des ensembles d’armures de guerre du Japon ici en France. Symboles de guerre mais surtout de puissance, elles se révèlent encore plus extraordinaires tout en étant terrifiantes lorsqu’elles appartiennent à un daimyô. Or qu’est-ce qu’un daimyô ? Titre de la noblesse dans un Japon féodal, le daimyô est un seigneur détenteur d’un domaine et issu de la classe guerrière. Le guerrier japonais est tant inscrit dans l’imaginaire collectif des Japonais qu’au-delà des nombreuses références dans le secteur du divertissement, une tradition culturelle persiste encore de nos jours. Ainsi lors du Kodomo no hi, ou la journée des enfants qui célèbre principalement les garçons, les Japonais célèbrent une tradition  issue de la classe des samouraïs ! Si de nos jours, cette journée est davantage connue ici en Occident pour les koi nobori déployés, les garçons reçoivent d’autres présents : un kabuto, ou miniature de casque de samouraï et/ou une gogatsu ningyô. Cette dernière est une poupée vêtue d’une armure de samouraï à exposer dans le tokonoma. C’est cette pratique qui nous vient  du Japon féodal, de la période Kamakura à la période d’Edo, où les 5 mai, les familles de samouraï offraient comme présent à leurs fils des éléments de leur armure future. La fête s’appelait alors tango no sekku, remplacée par le kodomo no hi en 1948.

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Quatre armures de daimyô au MNAAG ©2018 Japan FM.

Et pourtant, c’est bien avant que les armures guerrières ne sont plus utilisées au Japon, dès 1877,  lorsque les derniers samouraïs en faveur du maintien du système féodal échouent dans la rébellion de Satsuma. En effet, dès 1871, la Restauration Meiji instaure un nouveau système gouvernemental avec la création des ken, ou départements, mettant fin aux han, ou fiefs des daimyô. Les daimyô, anciens seigneurs guerriers, ne sont plus, étant remplacés par une noblesse intellectuelle. C’est aussi avec la Restauration Meiji que nous parvient en France la première étude la plus complète sur le système nobiliaire japonais grâce au jésuite français Edmond PAPINOT et son « Nobiliaire du Japon » (1899) puis à partir de 1938 jusqu’au début des années 2000 et en raison de la dispersion de collections, les armures guerrières et leurs accessoires remplissent les collections françaises, privées comme publiques ! C’est ainsi que vous pourrez voir au total 33 armures rarement présentées au public, voire pour certaines inédites, grâce à cette exposition « DAIMYÔ, Seigneurs de la guerre au Japon ».

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Jinbaori en plumes de paon à voir à l’Hôtel d’Heidelbach ©2018 Japan FM.

En regardant avec attention les différents éléments de l’armure du daimyô, comme le casque sur lequel se trouvent des motifs déstabilisants, tout dans la tenue guerrière du daimyô est fait pour que ce dernier exprime son pouvoir, sa puissance. Intimidantes, elles sont aussi esthétiques en étant démonstratrices de la richesse de son propriétaire comme le montrent les gravures raffinées et les matériaux employés telles les plumes de paon sur le jinbaori ou manteau porté par-dessus son armure!

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Une armure de daimyô vue de dos, exposée à l’Hôtel d’Heidelbach ©2018 Japan FM.

Mieux encore, certaines armures sont visibles de face comme de dos, révélant la complexité pour les guerrier pour vêtir leur armure. Le musée vous recommande ainsi de débuter la visite à l’Hôtel d’Heidelbach qui vous posera le contexte de la création des collections françaises de ces armures, ainsi que l’évolution historique des daimyô avec différents éléments d’armures comme des casques, des katanas ou encore des bâtons de commandement d’un grand raffinement, avant de découvrir 11 armures complètes toutes somptueuses grâce à une scénographie extraordinaire dans la rotonde du 4ème étage du musée principal. Enfin, 8 armures de daimyô s’inscrivent dans une œuvre monumentale de George Henry LONGLY au Palais de Tokyo, dans le cadre de la saison Discorde.

« Discorde, fille de la nuit »

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Une des armures exposées au Palais de Tokyo, dans l’installation « Le corps analogue » de George Henry Longly ©2018 Japan FM.

Au Palais de Tokyo, lieu dédié à l’art contemporain, l’exposition « DAIMYO, Seigneurs de la guerre au Japon » se poursuit avec l’installation de George Henry LONGLY « Le corps analogue », faisant alors résonner 8 armures de daimyô avec vidéos, sons et sculptures, tels des prolongements du corps humain. Cette installation s’inscrit dans le cadre de la saison  Discorde, une exposition de plusieurs projets collectifs et multidisciplinaire. Sous ce thème, sont dévoilés les œuvres ou les projets d’artistes évoquant leur rapport à la guerre, nourrissant leurs réflexions sur le cycle répétitif des conflits et s’interrogeant sur la lecture que nous faisons aujourd’hui sur ces guerres passées. Ces armures de daimyô qui fascinent et nous émerveillent de par leur esthétisme, ne devrions-nous pas en être angoissés lorsqu’elles nous rappellent ces masques de privation sensorielle ? Et de s’interroger finalement sur le rôle des daimyôs : alors qu’on les perçoit tels des guerriers sanguinaires assoiffés de domination et de pouvoir, auraient-ils en fait tenté d’éviter tout conflit en portant leurs armures effrayantes ? Si la première partie d’exposition permet de poser des faits, un contexte et d’apprendre un morceau d’Histoire, la seconde au Palais de Tokyo nous pousse à réfléchir au-delà et à nous remettre en question.

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Détail sur le casque d’une armure de daimyô, installation « Le corps analogue » de George Henry Longly, Palais de Tokyo ©2018 Japan FM.

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Vue sur « Bouche moi ce trou », Anita Molinero, Palais de Tokyo ©2018 Japan FM.

Ainsi, après être passée sous « Bouche moi ce trou » et de « Tina » d’Anita MOLINERO, œuvres pleines d’humour ambiance « Mad Max » -ne manquez surtout pas le cartel explicatif dessiné par Winshluss, on vous recommande de ne pas manquer le projet « L’Un et l’Autre » de Kader ATTIA et Jean-Jacques LEBEL. Deux artistes différents et issus de générations différentes qui proposent de regarder autrement la nature même des conflits qui ont traversé l’histoire contemporaine de l’Humanité. Ne portons-nous pas, chacun, le poids d’une responsabilité collective ? Attention, une des cabines de ce projet-là, montrant des scènes de torture dans la prison d’Abou Ghraib en Irak, est interdite aux mineurs en raison des images choquantes qui y sont exposés à la manière d’un labyrinthe. Des violences faites par des soldats à leurs prisonniers ou quand le bourreau devient victime. « L’Un et l’Autre » questionne aussi sur le regard qu’on veut nous faire porter sur l’Autre,  par les médias. Ce regard est-il réellement le reflet de la réalité, ou est-ce ce qu’on souhaite nous faire croire pour encore moins nous culpabiliser ? On achève sa visite par le projet  de Neïl BELOUFA, « L’Ennemi de mon ennemi », dans lequel l’artiste questionne le visiteur sur des incohérences de notre histoire géopolitique en revenant sur des faits, et dénonçant « l’interchangeabilité des stratégies et des discours » niant parfois le rôle d’un bourreau qui prendrait presque la place de la victime comme par exemple dans la venue historique de Barack OBAMA à Hiroshima, premier président américain en exercice à s’y être rendu après y avoir largué la bombe atomique, ou dans la glorification des morts pour la patrie, parmi lesquels des criminels de guerre, à Yasukuni. Finalement, comment définir ce qui est Bien ou Mal ?

Une double exposition à ne surtout pas rater tant il est rare de pouvoir observer de si près des armures et objets si bien conservés et si somptueux surtout qu’en prenant une entrée dans l’un ou l’autre musée vous pouvez accéder à l’ensemble des salles d’exposition de chacune des institutions. Foncez, d’autant que si vous allez au musée national des arts asiatiques-Guimet avant le 12 mars, et que vous ne l’aviez pas encore vu, vous pourrez également toujours voir « Les Enquêtes vagabondes » !

Informations pratiques dans votre agenda.

Photo : Vue sur une armure d’un daimyô exposée dans la rotonde du musée Guimet ©2018 Japan FM.

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