Charlotte PERRIAND, une illustration de l’amitié franco-japonaise

A l’occasion de Japonismes 2018, les éditions Norma publient l’ouvrage collector « Charlotte Perriand et le Japon » de Jacques BARSAC. A découvrir en librairies depuis le 17 mai.

En 1940, le Japon s’est ouvert au monde depuis peu et est en pleine politique d’expansion en Asie. Cette année-là, à l’autre bout du monde, en France, se trouve une jeune femme architecte et designer, Charlotte PERRIAND. Elle aura un parcours hors-norme qui marquera durablement l’architecture, le design et l’artisanat. Si impactant qu’ils sont nombreux à être élogieux à son sujet, de Germain VIATTE qui décrit l’artiste comme l’incarnation du « nouveau type de femme que le XXème siècle a façonné en quelques décennies » à Sôri YANAGI qui ne tarit pas d’éloges en louant son sens de l’observation et sa capacité à comprendre le Japon ! C’est en 1940, à une époque où les femmes n’ont pas encore le droit de vote, que lui est offerte l’opportunité de séjourner au Japon durant une année pour devenir conseillère pour le ministère du Commerce japonais ! Née en 1903 et après des études à l’Union centrale des arts décoratifs, Charlotte PERRIAND se fait remarquer très rapidement au Salon de l’Automne en 1927 en présentant son Bar sous le toit, une réalisation moderne et avant-gardiste. Elle approche alors Pierre JEANNERET et Le CORBUSIER qui lui proposent de s’associer à eux. C’est ainsi que plus tard elle rencontre Junzô SAKAKURA, architecte japonais qui séjourne durant plusieurs années à Paris pour travailler et étudier dans l’atelier de Le CORBUSIER. Revenu au Japon, le ministère du Commerce charge Junzô SAKAKURA de proposer un Français pour « orienter la production de l’art industriel au Japon » à travers un emploi de conseiller auprès du ministère et mentionne le nom de Charlotte PERRIAND. Ce n’est pas la première fois que le pays fait appel à des étrangers pour ce faire, c’est une nécessité notamment parce qu’ «  avec sa culture et son mode de vie ancestral, [le Japon] est dans l’incapacité de produire des objets dont il ne connait pas l’usage ». En juin 1940, peu avant l’Armistice entre les Allemands et les Français, Charlotte PERRIAND part en bateau au Japon, jusqu’à Kôbé avant de rejoindre Tôkyô. Si ce séjour dure un an, elle ne rentrera en France qu’en 1946, bloquée en Indochine en raison de la guerre.

 

Salle à manger-séjour présentée à l’exposition « Contribution à l’équipement intérieur  de l’habitation, Japon 2601. Sélection, tradition, création », Tôkyô, mars-avril 1941. Photographie Francis Haar/AChP. © Archives Charlotte Perriand/Adagp, Paris, 2018

 

De retour dans une France en ruine, elle n’oublie pas le Japon et s’inquiète pour tous ses amis sur place. Mais elle ne peut y retourner qu’en 1953. Charlotte PERRIAND poursuit ses créations inspirées des meubles japonais, synthèse du traditionnel japonais et de la modernité, tout en promouvant les travaux de ses confrères français en atteste l’exposition « Proposition d’une synthèse des arts, Paris 1955. Le Corbusier, Fernand Léger, Charlotte Perriand » en 1955. La même année, elle repart en France. Elle y reviendra dans un cadre professionnel en 1959 pour y réaliser deux dernières commandes pour Air France. Elle conçoit pour eux leur agence à Tôkyô dans le quartier de Ginza, puis ensuite à Ôsaka.

 

Salle de réception présentée à l’exposition « Proposition d’une synthèse des arts, Paris 1955. Le Corbusier, Fernand Léger, Charlotte Perriand » aux grands magasins Takashimaya, Ginza, Tôkyô, 1955. DR/AChP. © Archives Charlotte Perriand/Adagp, Paris, 2018

 

Si elle permet à des architectes et designers français de rayonner au Japon, en France, elle en fait de même pour les Japonais. Elle présente la Maison japonaise durant le Salon des arts ménagers à Paris en 1957 où elle présente les réalisations d’architectes et d’artisans japonais comme des créations de son ami Sôri YANAGI. Loin de n’être qu’une simple exposition, la Maison japonaise permet aussi de faire découvrir le mode de vie et la culture japonaise. Plusieurs années plus tard, quand Junzô SAKAKURA est appelé à construire la résidence de l’Ambassadeur du Japon à Paris, il propose à son amie d’en réaliser l’aménagement intérieur. Toute sa carrière n’est pas seulement liée qu’au Japon mais sa dernière création en 1993, elle a 90 ans, est tournée vers ce pays qu’elle affectionne avec la réalisation avec trois autres créateurs d’une Maison du Thé, éphémère, sur l’esplanade de l’UNESCO.

 

Salon de la résidence de l’ambassadeur du Japon à Paris, 1966-1969. Photographies Pernette Perriand-Barsac/AChP.© Archives Charlotte Perriand/Adagp, Paris, 2018

C’est tout cet échange intellectuel et artistique fascinant entre une femme exceptionnelle et le Japon qui est détaillé et illustré dans ce beau-livre écrit par son gendre, Jacques BARSAC. Publié initialement en 2008, à l’occasion du 150ème anniversaire des relations diplomatiques entre la France et le Japon, c’est pour le 160ème anniversaire et de la saison culturelle Japonismes 2018 – Les âmes en résonnance qu’est réédité « Charlotte Perriand et le Japon ». L’occasion alors de découvrir ou de redécouvrir un personnage essentiel, reflet de cette compréhension particulière entre Japonais et Français. Sôri YANAGI écrivait d’elle que « de tous les Occidentaux qui ont travaillé au Japon, c’est probablement elle qui a eu la plus grande influence  sur le monde du design japonais ».  L’actuel Ambassadeur du Japon en France Monsieur KITERA aime à dire que « ce sont les Français qui comprennent le mieux la culture japonaise, et ce sont les Japonais qui comprennent le mieux la culture française. ». Charlotte PERRIAND en est un parfait exemple.

 

« Charlotte Perriand et le Japon » de Jacques Barsac, Norma éditions.

Prix conseillé: 50€

 

Photo : Charlotte Perriand à la plage de Chôshi, Japon, 1954. Photographie Jacques Martin/AChP. © Archives Charlotte Perriand/Adagp, Paris, 2018

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