Taro ASO blâme les femmes sans enfants et rétracte (encore) ses propos

Le 3 février, le ministre des Finances (et vice-Premier ministre) avait blâmé les couples n’ayant pas d’enfants d’être responsables de la hausse du coût de la sécurité sociale japonaise et de la crise démographique que traverse le Japon.

Ce n’est pas un secret, entre l’espérance de vie très élevée et le faible nombre de naissances, le Japon se retrouve confronté à une crise démographique. Depuis 2005, la population est en diminution. En 2008, les Japonais déploraient plus de décès que de naissances puis en 2017, la situation devenait alarmante avec moins d’un million de naissances enregistrées pour l’année, soit le plus bas nombre de naissances.  Or, sans solution pour inverser cette tendance, la population japonaise risque de ne compter que 88,1 millions d’individus en 2065 selon le National Institute of Population and Security Research, alors que le Japon compte 127 millions d’habitants selon un recensement de 2015. L’un des enjeux de cette crise démographique est pour le gouvernement japonais d’inciter les femmes à avoir des enfants, mais aussi de financer le système de sécurité sociale des Japonais. C’est dans ce contexte que le ministre des Finances et vice-Premier ministre du Japon, Tarô ASÔ a prononcé des mots qui sont rapidement devenus polémiques. C’est lors d’une réunion politique à Ashiya dans le département de Fukuoka que le ministre a comparé les personnes n’ayant pas d’enfants comme étant « un problème » en faisant référence au vieillissement de la population et à la crise démographique. D’après la version anglaise de l’Asahi Shimbun, ses propos exactes étaient : « Il y a tant de dingues qui blâment les citoyens seniors (pour ces problèmes), mais ils ont tort. Au contraire, le problème se trouve chez les personnes qui n’ont pas eu ou n’ont aucun enfant. ». Certes, le vieillissement de la population et la question du financement du système de protection sociale sont un problème pour le Japon, mais le formuler de cette façon était « inappropriée ». C’est ce que les parlementaires ont dénoncé au lendemain de cette déclaration, ne serait-ce que parce qu’ils estiment que ce sont des propos manquant de sensibilité au regard des nombreuses personnes qui ne sont pas en mesure d’avoir des enfants quand bien même ils le désirent. Comme le rappelle l’éditorial de l’Asahi Shimbun, le choix d’avoir des enfants ou non est une décision strictement personnelle dans laquelle la politique n’a pas à interférer. Mais il a fallu encore une autre journée avant que Tarô ASÔ ne rétracte les propos polémiques. Et encore, s’il indique que « si mes propos ont offensé qui que ce soit, je m’en excuse »,  le ministre s’est justifié en disant que seule une partie de ses propos avait été rapportée.  Problème, la presse japonaise le rappelle, ce n’est pas la première fois qu’il attaque les femmes sans enfants. En 2014, il avait fait une déclaration quasiment identique à celle prononcée ce 3 février avant de se rétracter.

 

Ce n’est pas la première fois non plus que le ministre des Finances se fait remarquer pour des propos sexistes. Il est même considéré par la presse japonaise comme une personnalité « enclin à faire des gaffes ». Le 9 janvier 2019, un sondage réalisé par un collectif d’enseignants à l’université et d’activistes appelé  No to All Sexist Public Speeches  (« Non à toutes déclarations publiques sexistes » en français) a dévoilé ses résultats. Les participants étaient invités à voter pour les remarques les plus sexistes et discriminantes de la part de personnalités politiques pour l’année 2018. Tarô ASÔ est la personnalité ayant obtenu le plus de votes (1 208 sur 3 933 votes au total). En avril 2018, en plein #MeToo, lorsque le scandale FUKUDA est révélé par la publication de l’enregistrement d’un entretien entre Junichi FUKUDA et une journaliste restée anonyme, le ministre des Finances du Japon avait nié les allégations en soutenant son vice-ministre, blâmant même les victimes de harcèlement sexuel. Il avait ensuite insinué que « seuls des journalistes hommes devraient couvrir le ministère des Finances ».

 

Sources : Asahi Shimbun, Mainichi Shimbun, The Japan Times.

Photo : Le dernier gouvernement de Shinzô Abe, avec à sa droite, Tarô Asô ©Japan Kantei.

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