Makie Fujii avait 22 ans en 1945, et vivait paisiblement avec son mari, Kyoshi, et ses deux filles, Kazuko et Kiyomi, alors âgée de seulement 6 mois. Lorsque la bombe frappa la ville, la famille s’est retrouvée ensevelie sous les décombres de leur maison et alors que chacun tentait de s’en dégager, Makie entendit Kazuko, sa fille aînée, gémir mais elle-même était coincée avec son bébé dans les bras jusqu’à ce que son mari la trouve. Mais entre-temps, Kazuko meurt sans que quiconque parvienne à la libérer. Leur maison détruite et ravagée par les flammes, la famille dut se réfugier quelques jours chez des amis, où Makie Fujii constate qu’« à cause des radiations et du traumatisme lié à la bombe, je [Makie Fujii] ne pouvais plus allaiter ma fille. ». Puis la famille est partie se réfugier dans la préfecture de Yamaguchi chez les parents de Makie Fujii où cette dernière ne parvint pas à faire le deuil de la mort de Kazuko, car le sentiment d’avoir abandonné sa fille aînée l’envahissait. Et quand la famille Fujii est retournée à Hiroshima un an après le drame, le sort s’acharna : Kiyomi souffrait de « quatre abcès au niveau de la moelle épinière », conséquence des radiations, mais les frais médicaux étant trop élevé -la première assistance médicale envers les hibakusha n’apparaîtra qu’à partir de 1957 et l’aide financière ne sera proposée qu’à partir de 1968- ses parents ne purent la faire soigner très longtemps et Kiyomi mourut à l’âge de 7 ans. On ne sait si Makie Fujii est toujours envie, ni même ce qu’elle est devenue après la mort de sa deuxième fille. Certainement par pudeur, car peu de victimes ont osé et osent en parler. Lorsque le Hiroshima National Memorial Hall for the Atomic Bomb Victims décide à partir de 2006 de permettre aux hibakusha de témoigner de leur expérience des bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki, Makie Fujii fut l’une des premières victimes à accepter de participer à ce projet, afin que les générations suivantes n’oublient pas ce traumatisme. Elle a pris une seule fois la parole et ce fut l’occasion d’émettre son vœu : « Je souhaite que les gens se comprennent et vivent dans le respect les uns des autres. ».
Son récit intégral, ainsi que celui de huit autres victimes sont disponibles en français sur le site du Hiroshima National Memorial Hall for the Atomic Bomb Victims, que nous tenons à remercier : http://www.hiro-tsuitokinenkan.go.jp/linkfiles/french.pdf