Le Japon est un de ces pays où la peine de mort demeure appliquée. Mais un mouvement inédit se déroule à travers la Fédération des Associations des Barreaux du Japon qui a appelé ce 7 octobre à abolir la peine capitale.
C’est un pas en avant qui vient directement de la Fédération des Associations des Barreaux du Japon (JFBA) mais qui est pensé depuis plusieurs années. Il y a 5 ans en effet, lors d’une convention sur la protection des droits de l’homme, la JFBA avait alors émis le souhait d’une « société sans peine de mort ». Mais ce qui est nouveau à ce jour, c’est que lors d’une nouvelle convention consacrée à ce sujet, les 37 600 avocats environ que compte la JFBA se sont mis d’accord pour appeler à l’abolition de la peine capitale et privilégier la prison à vie. Certes, les débats ont été houleux avant que la fédération ne fasse cette déclaration commune et publique, et surtout il s’agit d’un appel à abolir la peine de mort d’ici 2020, soit… avant les Jeux Olympiques de Tokyo ! Peu étonnant puisque la communauté internationale appelle le Japon à mettre fin aux exécutions depuis de nombreuses années. Ce n’est donc pas surprenant que cet appel ait été salué non seulement par ceux qui soutiennent l’abolition de la peine capitale au sein du pays, mais également salué par les pays étrangers et notamment l’Union Européenne, qui avait appelé à l’abolition de la peine de mort au Japon depuis de nombreuses années. Un autre argument de poids explique ce soutien à l’abolition puisqu’en 1989, un Traité d’abolition de la peine de mort avait été adopté à l’ONU, où le Japon espère depuis quelques années (avec l’Allemagne, l’Inde et le Brésil) un siège permanent. La France, elle, via son ambassade au Japon a exprimé son souhait de voir émerger un réel débat à ce sujet.
Depuis 2012, année du retour au pouvoir de Shinzo ABE, 16 individus ont été exécutés. Et selon Amnesty International, 13 individus risquent d’être exécutés à l’avenir en l’état actuel des choses, – ces derniers ayant fait partie de la secte Aum et ayant eu un rôle dans l’attentat au gaz sarin, dont le dernier procès autour de cet attentat s’est achevé en septembre ouvrant ainsi la voie à la mise en application de la condamnation à mort des 13 individus concernés par la peine capitale. L’ONG internationale a alors rédigé une pétition adressée au Ministre de la Justice ce 3 octobre, appelant à abolir la peine de mort avec pour argument que les exécutions sont présentées au Japon « comme une solution efficace dans la lutte contre le terrorisme, en dépit d’un manque criant d’éléments prouvant qu’il a un réel effet dissuasif. ».
Toutefois, il semble que la population japonaise soit majoritairement en faveur du maintien de la peine capitale. Selon un sondage réalisé par le gouvernement fin 2014 (sondage réalisé tous les 5 ans depuis 1965), 80,3% des Japonais approuvent la peine de mort, déclarant en premier lieu que mettre fin aux exécutions empêcherait les familles des victimes de trouver la paix, mais aussi que la peine capitale serait un moyen dissuasif de commettre des crimes. Quant aux arguments de ceux en faveur de l’abolition de la peine capitale, ils expriment l’impossibilité de revenir en arrière en cas d’erreur judiciaire, mais estiment également qu’au contraire les exécutions n’auraient pas d’effet dissuasif.
C’est donc un pas important qui a été engagé et qui peut mener à un réel débat sur cette question. Mais tout comme l’opinion publique, sur un plan politique et gouvernemental, le Ministre de la Justice du Japon, Katsutoshi KANEDA, nommé à ce poste en août 2016, a déclaré publiquement être en faveur de la peine de mort.
Sources : The Japan Times, Courrier International, Amnesty International, Nippon.
Photo : Manifestation contre la peine de mort au Japon en 2009 ©AFP source i24News