A quelques jours de son retour à Paris pour son concert au FLOW le 8 octobre, le guitariste Tomoyasu HOTEI a accepté de répondre à quelques questions par mail, le temps d’évoquer 37 ans de carrière, les débuts de sa carrière internationale et la France !
JFM: Bonjour Tomoyasu HOTEI! Vous allez démarrer votre tournée européenne dans quelques semaines. Avec un passage à Paris, au Flow ce 8 octobre! Vous étiez déjà venu une première fois en France, en 2016, c’était à la Boule Noire. Quels souvenirs gardez-vous de ce premier concert parisien?
HOTEI: Bonjour! Je vous remercie pour cette interview. L’excitation de mon premier concert à Paris est inoubliable. En fait j’étais très nerveux car je n’étais pas bien sûr de la manière dont ma musique serait reçue par le public français. Mais quand je suis arrivé il y avait beaucoup de fans français qui m’attendaient à la porte. L’un d’entre eux était d’ailleurs un grand fan de mon précédent groupe BOØWY. J’ai perçu une grande attente et de l’enthousiasme dans leurs yeux et je me suis alors promis « ce soir je ferai de mon mieux ». Aussitôt que le concert a commencé j’ai été si ému par le public, ça m’a touché au coeur. C’était certainement une des meilleurs scènes que j’ai jamais faite. Indépendamment du public, hommes, femmes, Français ou Japonais, j’ai sans aucun doute senti l’unité ce soir-là. Et je me suis juré « je reviendrai dans cette ville » pour revoir mes fans à Paris.
JFM: Vous êtes une immense star au Japon! Vous y avez d’ailleurs célébré 35 ans de carrière en 2016, avec notamment votre 40ème Nippon Budokan. Quel regard portez-vous sur l’ensemble de votre carrière?
HOTEI: Whoa! S’il vous plaît, ne me parlez pas comme si j’étais un grand père, haha… J’ai pu rencontrer tant de personnes précieuses tout au long de ma carrière, qui a été remplie de challenges et d’aventures. Tout a commencé quand j’ai eu ma première guitare. Cet instrument aux possibilités illimitées m’a encouragé à continuer cette aventure jusqu’ici. C’est grâce à cette guitare que j’ai été assez chanceux pour collaborer avec mes héros légendaires comme David BOWIE, les Rolling Stones ou Iggy Pop. Si j’étais devenu chanteur, j’aurais pu choisir un chemin complètement différent. J’aurais aimé pouvoir dire que ça été rapide comme l’éclair mais 35 ans ce n’est pas court. J’apprécie sincèrement le soutien continu de mes fans, mon équipe, ma famille et mes amis.
JFM: Pouvez-vous me raconter votre meilleur et votre pire souvenir en 37 ans de carrière?
HOTEI: Ce doit être le moment où j’ai collaboré avec mon héros de toujours, David BOWIE au Budokan. J’étais sur scène en première partie et aussi interprété une chanson avec David plus tard sur ce concert. C’était le moment le plus intense de ma vie et en même temps j’étais si ému. Un mauvais souvenir ? Ne me les rappelez pas car je suis sur le point de les oublier!
JFM: Une immense star au Japon et pourtant, vous vous produisez dans des salles bien plus confidentielles que le Nippon Budokan en Europe! Si les Français peuvent ne pas connaître votre nom, ils reconnaîtront pourtant forcément quelques-uns de vos titres comme « Battle without Honor and Humanity » qui a servi pour l’OST de « Kill Bill » mais aussi à une moindre échelle pour l’émission « Téléfoot »en France! C’est difficile de penser carrière internationale alors que vous avez déjà une sacré carrière au Japon ?
HOTEI: Cette relation que j’ai noué avec mes fans durant ces décennies est mon trésor. A mes débuts, j’ai commencé par jouer dans des petites salles devant 20 personnes. Bien entendu, j’étais fauché, vivant dans un petit appartement. Tout ce que j’avais c’était une guitare. Comme ce que désirent la plupart des jeunes, j’ai rêvé d’une vie luxueuse avec une grande maison et de belles voitures. Puis je suis devenu célèbre et j’ai été en mesure de posséder tout ça. Cependant, je n’ai pas encore atteint le but ultime dont je rêve depuis que je suis adolescent. Celui d’une tournée mondiale à succès. Il n’y a aucun moyen facile pour se faire une place dans le marché international mais une rencontre avec Quentin TARANTINO m’a donné une chance. La plupart du temps, les gens peuvent reconnaître mon titre de « Kill Bill » bien qu’ils n’aient jamais entendu mon nom auparavant. Il est possible que ce titre devienne la musique la plus connue composée par un artiste japonais. Quand je joue ce titre en festival en dehors du Japon, il m’arrive parfois de recevoir des compliments après le concert comme « cette reprise de la musique de Kill Bill était si fantastique !». Donc récemment, j’ai intentionnellement annoncé juste avant de la jouer: « Mesdames et messieurs, je vous présente la meilleure reprise du monde » (lol). La musique est plutôt simple pourtant elle contient différents éléments attractifs qu’une guitare puisse offrir. D’évidence, c’est ma carte dorée!
JFM: En fait, outre « Kill Bill» vous avez participé sur les musiques de plusieurs grands films américains sortis dans le monde entier comme « Fear and Loathing in Las Vegas » ou encore vous aviez interprété votre version du célèbre thème pour « Mission Impossible: Protocole Fantôme ». Alors pourquoi avoir attendu si longtemps avant de jouer votre musique à l’international (et donc développer votre carrière internationale) ?
HOTEI: J’ai été si chanceux de pouvoir travailler avec mes réalisateurs favoris, Quentin TARANTINO et Terry GILLIAM. Quand on m’a demandé de revisiter le thème de Mission Impossible, j’ai rencontré Tom CRUISE qui a à peu près mon âge, et il a fait des éloges chaleureux de mon interprétation du thème. Lorsqu’on m’a donné ces projets internationaux, je n’avais alors pas vraiment saisi cette opportunité d’une carrière dans le monde. C’est probablement parce que je n’en voyais pas la nécessité. L’industrie musicale au Japon est plutôt importante et la plupart des artistes ont tendance à avoir une idée conservatrice préférant maintenir leur position sur le marché plutôt que d’essayer de se développer à l’étranger avec, certes, des risques. La plupart d’entre eux ressentent également la barrière de la langue. D’une certaine façon, j’étais moi aussi dans cette position. J’étais capable de maintenir les ventes et mes tournées étaient toujours sold out. Mais un jour, un puissant tremblement de terre a frappé la région du Tôhôku au Japon et beaucoup de vies précieuses furent emportées. Alors que j’ai pu voir de nombreuses scènes tragiques à la télévision, j’ai profondément réfléchi au sens de la vie. Quelques temps après j’étais sur ma tournée pour mes 35 ans de carrière et j’ai été dans tout le Japon. A travers mes concerts, je voulais encourager le public en leur insufflant comme message « combien il est important de poursuivre ses rêves ». Mais quand je me posé la question à moi-même « est-ce que je poursuis toujours mon rêve d’une tournée mondiale? », la réponse était « non » et j’étais alors insatisfait de ma situation. J’allais avoir 50 ans mais j’ai pensé qu’il n’était jamais trop tard. Quand j’ai parlé de mon rêve avec ma famille, « déménager à Londres et poursuivre plus d’opportunités mondiales », ils ont totalement compris et soutenu et nous avons déménagé à Londres. Six ans ont passé et je n’ai pas encore atteint mon but mais je suis certain d’avoir pris la bonne décision.
JFM: Pour ce faire, vous avez donc déménagé à Londres en 2012 avec votre famille. Vous auriez pu emménager à Los Angeles par exemple mais il semble que vous avez une longue histoire d’amour avec cette ville puisque vous y aviez enregistré en 1988 votre premier album en solo?
HOTEI: Je prefère être en costume cravate. Ce serait un peu étrange à L.A.,non ? (lol) J’ai adhéré au Glam Rock des années 70 quand j’avais 14 ans et j’étais obsédé par le Punk, le New Wave et la musique d’avant-garde britannique. Alors naturellement, j’avais le désir de vivre un jour à Londres. En fait, j’ai même eu un appartement à Abbey Road et vécu là-bas un temps. Quand j’ai déménagé de Tôkyô avec ma famille il y a six ans, j’ai tout laissé vendant même ma maison, une Bentley etc… C’était littéralement le début d’une nouvelle vie. Certains pourraient dire que cela aurait pu arriver avant mais il n’est jamais trop tard. C’est même un avantage puisque mon style musical est établi grâce à ma carrière au Japon donc je peux me concentrer sur ce qu’il me reste à faire. La vie à Londres est si agréable. Seuls quelques trucs mineurs m’embêtent encore comme la lenteur du WiFi, des produits manquant en livraison ou encore les grèves de métro! Mais aujourd’hui je suis en mesure de faire des choses que je ne pouvais pas faire à Tôkyô car personne ne me connaît ici. Je peux regarder et observer les gens dans le bus ou le métro, m’allonger sur l’herbe dans le parc et manger un sandwich, boire une bière dans un pub et regarder un match de football. A Tôkyô, on me repère si facilement car je suis plus grand que la plupart des gens …
JFM: Vous avez désormais de nombreuses collaborations récentes avec des artistes internationaux comme Iggy Pop ou encore Richard Z. Kruspe ! Comment sont nées ces dernières collaborations musicales? Y a-t-il d’autres artistes avec lesquels vous rêveriez de travailler ?
HOTEI: Dans un premier temps, j’ai demandé à ce qu’on envoie des démos depuis mon label au Royaume-Uni. L’un comme l’autre connaissait déjà mon titre pour « Kill Bill» et comme ils ont aussi aimé ma démo, ils ont immédiatement et chaleureusement accueilli ma proposition. Concernant Iggy, j’avais initialement envoyé deux titres et voulais qu’il en choisisse un. Mais il a écrit les paroles pour les deux et m’a renvoyé la démo avec ses paroles brutes dessus. Plus tard, je me suis envolé vers Miami pour enregistrer sa voix en studio. Quand je l’ai rencontré pour la première fois, il est arrivé avec sa Rolls Royce convertible, assis torse nu sur le siège conducteur … Je me suis alors dit « Wow!…»Contrairement à ce que les gens pourraient croire, il est si gentleman et très intelligent. J’ai hâte de faire un concert avec lui dans un futur proche. Richard est aussi très facile et un homme cool. Nous avons un point commun avec Richard, c’est que nous recherchons tous deux un son de guitare moderne et avant-gardiste. A l’avenir, j’aimerais travailler avec différents artistes même dans d’autres genres musicaux et être inspiré. Ne serait-ce pas intéressant avec Beyoncé ? Mais pas seulement avec des artistes renommés, je suis aussi totalement ouvert à la collaboration avec un jeune artiste inconnu.
JFM: Un artiste français avec lequel vous voudriez collaborer?
HOTEI: Cet été j’ai vu Charlotte GAINSBOURG jouer à un festival à Londres. C’était très sophistiqué, sexy et évolué. Un jour j’aimerais jouer de la guitare à ses côtés sur scène. Bien sûr ce serait formidable si je pouvais collaborer avec Daft Punk ! Je m’intéresse aussi à La Femme, Clara LUCIANI, Zaz, Agar Agar, Last Train, Cotonete… Faites le moi savoir si vous avez d’autres suggestions!
JFM: 2018, retour en France dans le cadre d’une tournée européenne. Que nous réservez-vous lors de ce concert ?
HOTEI: J’espère que vous apprécierez le concert sans préjugé et je vous promets de vous offrir une musique moderne et agréable à la guitare en compagnie de mon merveilleux groupe. Le répertoire incluera un titre de « Kill Bill », quelques titres instrumentaux, des chansons de mes albums les plus récents mais aussi quelques gros hits au Japon. Je suis en train de préparer la set list qui pourrait plaire à tout le monde que vous soyez Français ou Japonais. Pour les amoureux de guitare, je souhaiterais qu’ils apprécient ma façon de jouer. Pour une expérience ultime, je voudrais que vous écoutiez mes albums « Strangers » et « Paradox », également disponibles sur Spotify, avant de venir au concert. Sinon, il y aura aussi des T-shirts cools, des DVDs live et des CDs du Japon qui vous attendront alors s’il vous plaît pensez à ramener du cash en plus dans votre poche ! (lol)
JFM: Pas d’album à promouvoir mais vous annoncez cependant la préparation d’un nouvel album pour 2019! Que pouvez-vous nous dévoiler de cet album? Une date de sortie prévue?
HOTEI: Je suis actuellement en plein milieu de la production de cet album qui est prévu pour le printemps 2019. Ce sera une sortie internationale comme pour le précédent album « Strangers ». Cette fois je travaille avec un nouveau producteur, ce qui donnera un album des plus audacieux et palpitant.
JFM: Vous annoncez également votre retour dans la foulée pour une nouvelle tournée européenne! Envisagez-vous alors de revenir chaque année en Europe? Et la France fera-t-elle de nouveau partie de cette tournée?
HOTEI: Après la sortie de ce nouvel album l’an prochain, je participerai activement à des festivals en Europe et en Amérique et bien sûr je reviendrai également en France. Je veux monter sur scène le plus souvent possible et gagner du public dans chaque région. Mon rêve est de changer ce fait: « Le Japon est la maison, les autres régions sont éloignées » à « C’est chez moi partout, dans toutes les régions ». Je voudrais que dans toutes les villes quelqu’un m’attende avec un « Bon retour chez toi »!
JFM: D’ailleurs, est-ce que vous aimez la France, et si oui, qu’aimez-vous le plus de notre pays?
HOTEI: Aucun doute, j’adore la France! Ce que j’aime le plus ce sont les belles Françaises! (je plaisante, haha!) Ce serait ennuyeux si je répondais simplement « eh bien j’aime le vin…», non? Chaque fois que je visite Paris je suis vraiment touché par l’histoire architecturale et les rues remplies de culture. Je respecte aussi à quel point les Français apprécient et sont passionnés par l’art, la mode et la cuisine. Le paysage de province est également magnifique. Un jour j’aimerais y vivre six mois par an pour vivre complètement la culture française. Peut-être alors que je pourrais essayer de sortir avec une charmante Française!
JFM: Un dernier mot pour les lecteurs de Japan FM?
HOTEI: L’audience de Japan FM a probablement déjà de l’intérêt pour la culture japonaise. Peut-être que certains d’entre vous ont une connaissance plus approfondie que moi !? Tout comme chaque artiste japonais a sa spécificité, j’ai moi aussi mon style unique. Si vous voulez découvrir quelque chose de nouveau et de jamais expérimenté, venez s’il vous plaît voir mon concert. Je vous garantis que vous l’apprécierez et que vous serez heureux. J’ai hâte de voir mes amis en France. Je vous suis reconnaissant de cette interview, merci!! HOTEI.
Merci beaucoup HOTEI! Rendez-vous donc le 8 octobre au Flow à Paris à 19h.
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