Le Japon voit sa population vieillir, c’est un fait. Encore récemment, la presse relayait les derniers chiffres d’une natalité toujours en baisse tandis que la population vit plus longtemps. C’est le sujet de Plan 75 de Chie HAYAKAWA, récompensée au Festival de Cannes il y a un mois d’une mention spéciale Caméra d’or. Un film que je n’ai pas encore vu mais que je suis impatiente de découvrir pour le sujet abordé. Bonne nouvelle, puisqu’initialement annoncé au cinéma le 28 septembre, la sortie a été avancée au 7 septembre 2022 !
Si vous êtes fan de cinéma japonais, peut-être que le titre vous parle ? En effet, Plan 75 avait déjà fait l’objet d’un court métrage en 2018. C’était alors un film intégré à un ensemble de courts métrages d’anticipation appelé Jû-nen : Ten Years Japan (Anticipation Japon en français mais hélas non disponible sur notre territoire). Cet ensemble de cinq films, orchestré par Hirokazu KORE-EDA en tant que producteur exécutif, abordait différents sujets de société sources d’inquiétudes au Japon 10 ans dans le futur, comme l’intelligence artificielle, la radioactivité ou encore le vieillissement de la population dont vous trouverez la bande-annonce (en VOST anglais) ici.
Le synopsis officiel de Plan 75 : Au Japon, dans un futur proche, le vieillissement de la population s’accélère. Le gouvernement estime qu’à partir d’un certain âge, les seniors deviennent une charge inutile pour la société et met en place le « plan 75 ». Ce programme propose aux plus de 75 ans un accompagnement logistique et financier pour mettre fin à leurs jours. Une candidate au plan 75, Michi, un recruteur du gouvernement, Hiromu, et une aide-soignante philippine, Maria, se retrouvent confrontés à un pacte mortifère.
Ce qui a poussé Chie HAYAKAWA à se lancer dans Plan 75, c’est un fait dramatique : le massacre de Sagamihara en 2016. Pour rappeler les faits, un homme de 26 ans avait pénétré un centre de soin pour personnes atteintes de handicap mental à Sagamihara, près de Tôkyô, en pleine nuit. Armé d’un couteau, il avait assassiné 19 personnes et en avait blessé 26 autres. Il a justifié son geste en considérant que ces personnes devraient être euthanasiées car devenues inutiles pour la société. En mars 2020, il a été reconnu coupable et condamné à mort. Si le motif de cette tuerie concernait des personnes de tous âges atteintes d’un handicap mental, la réalisatrice n’a pas vu ce massacre comme un acte isolé mais qui serait le reflet d’une société devenue intolérante à l’égard des personnes faibles, incluant donc les personnes âgées, et privilégiant l’économie à l’humain. Si le « plan 75 » n’existe pas dans la réalité, c’est la question de la dignité humaine qui est centrale. Dans un Japon où le vieillissement de la population est problématique, les seniors subissent « pression sociale invisible qui leur donne le sentiment d’être inutiles et d’être un fardeau pour la société, leur famille, ou leurs amis » puisqu’une partie d’entre eux est contrainte de continuer à travailler pour survivre et non pas vivre, malgré un âge avancé. D’autres, par sentiment de honte et de refus d’être un fardeau, refusent de faire appel à un(e) assistant(e) social(e) en dépit d’une situation de précarité. Si l’histoire de Plan 75 évoque pour solution l’euthanasie de masse pour les seniors, l’intention de la réalisatrice est surtout de critiquer un manque d’empathie à l’égard des plus vulnérables.
Chie HAYAKAWA est née à Tôkyô en 1976. Elle a d’abord étudié la photographie, à la School of Visual Arts à New York où elle s’installe quelques années. A son retour à Tôkyô, elle s’inscrit à ENBU Seminar, une école d’art dramatique. Elle réalise son film de fin d’études, Niagara, en 2013. Chie HAYAKAWA n’est alors pas une inconnue au Festival de Cannes puisque grâce à ce fim de fin d’études, elle avait été sélectionnée en 2014 par la Cinéfondation ! Cette fois, c’est son premier long-métrage qui était en sélection officielle du Festival de Cannes et pour lequel la réalisatrice a remporté une mention spéciale Caméra d’or – la Caméra d’or récompensant un premier long métrage toutes sections confondues du Festival de Cannes ! La présidente du jury de la Caméra d’or, Rossy de PALMA, a souligné l’universalité du sujet de Plan 75 en décrivant « un film qui nous parle de notre humanité et au respect que l’on doit porter à nos anciens » avant d’annoncer la lauréate de la mention spéciale. Chie HAYAKAWA a alors exprimé sa reconnaissance, en disant que « tous les premiers films sont des films très particuliers qui nous tiennent à cœur », soulignant cet attachement en ajoutant « [être] très heureuse que ce film qui compte tant pour moi ait été sélectionné à Cannes ». Entre cette récompense à Cannes, les commentaires élogieux des professionnels du cinéma et journalistes qui ont déjà pu visionner ce film, et le sujet abordé par la réalisatrice, sans oublier que Plan 75 est une coproduction japonaise, française, philippine et qatarie, cela donne plein de raisons donnant envie de voir ce film à sa sortie en salles !
- Plan 75 de Chie Hayakawa, avec Chieko Baisho, Hayato Isomura et Stefanie Arianne. Durée : 112 minutes. Distribution en France par Eurozoom. Sortie annoncée en VOSTFR le 7 septembre 2022
Photo ©2022 – PLAN75 – FILM PARTNERS – URBAN FACTORY / FUSEE
J’espère pouvoir aller le découvrir au cinéma, la bande annonce m’a impressionnée et ce n’est pas une surprise vu le casting et la réalisation.
Merci pour cet article très intéressant 🙂
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